Ce que l'on a vu
Les éclats du jour nouveau illustraient l’aurore seulement quelques minutes après que tous les yeux se sont fermés. Sur le point culminant, d’une limpidité qui aveuglerait brutalement le commun des mortels, nous apercevions les traits des humains et constations toutes les courbes de leurs limites. Abruptement, ce qui constitue la matière laissa place au bruit du vent quand elle s’extirpa des six condamnés à créer. Le premier son anéantit le temps, confondit la vitesse et la lumière, transforma les voyelles en consonnes, les années en jours, les heures en minutes, fragment par fragment, en quelques secondes. La ligne de mire était la vue de tous. S’est ensuivi l'établissement de la matière parmi les êtres, après avoir été façonnée, une décennie durant par ceux en qui coule une différence veineuse. À l'ombre de toute source de lueur. Pourtant, la chair notifia il y a longtemps son envie de ne plus être, de ne finalement plus faire partie du voyage, après que l'encre a absorbé tout un agglomérat de matières minérales. À maints serments, elle fit savoir que, peu importe ce que déverse sa mine, aucune joie ne découle delle quand elle extériorise, mais le fruit de l'esprit l’a fit exécutante au service de l'inexistant. Dès son état embryonnaire. Le bruit du vent renversa la première lettre de son prénom, puis il donna une âme au vide. Ce fut irréversible, au service des autres, malheureusement pour le corps. La substance qui y émana se glissa ce faisant dans la première syllabe de vacuité, jusqu'à en occuper tout l'espace, puis les derniers mots s'éparpillèrent par myriades. Les yeux orphelins sur le visage, désormais uniques garants de tous les sens, pour que désormais seul le regard s’habille d’éloquence.


